Moi, je vais vous raconter quelque chose que je ne me rappelle
pas.
Je ne me rappelle pas de ma naissance, mais elle mérite qu'on s'y attarde .
Je suis né à
Plantagenet. Maman était de passage chez Grand-maman Legault avec sa soeur, ma tante Yvonne.
Imaginez vous que maman et tante Yvonne ont donné naissance dans la
même journée chez grand-maman, Evelyne Legault, qui était veuve à l'époque.
Grand-maman en
avait plein les bras. Imaginez, seule à un âge assez avancé
avec tous les travaux d'extras dans la maison et pas trop de commodités.
Mais à cette époque, les
gens avaient toujours le temps et faisait de la place aux imprévus au besoin.
Ces moments méritent un moment d'appréciation pour le dévouement intarissable et
inconditionnel de nos très chers arrières et grands parents.
Quelle belle image d'amour.
Je pesais dix livres à la naissance, un beau gros trésor!
C'est le surnom que maman nous a tous donné.
Encore, je ne me souviens pas, cependant, il est raisonnable de croire
que ça allait très bien mon affaire! Maman, bonne nourricière et avec de grosses
caresses me faisait faire mes rots. Elle travaillait beaucoup au jardin,
c'était pour assurer les réserves pour les mois d'hiver. Comme j'avais déjà
commencé à marcher, vers l'automne lorsqu'elle tardait à revenir pour me
nourrir, apparemment c'est moi qui allait la trouver pour la têtée. Je revenais à la maison le ventre
plein comme ont dit.
Maintenant il est temps de parler de souvenir à Forget suite au village
St Onge. Tante Yvonne était en visite chez nous, une matante qu'on aimait bien, pis elle avait du chien.
Elle et son mari Edmond avaient un magasin à Thurso et elle nous apportait
toutes sortes de choses, entre autres, les bonbons collés qu'elle ne pouvait pas vendre. Maman les faisait fondre et ça faisait un saudit de bon sirop.
Yvonne aimait
bien jouer des tours et demander des affaires impossibles.
Une bonne fois, elle m'appelle et me
dit: Gérard, j'ai une proposition. Si tu veux me montrer ton moineau je vais te
donner cinq cennes. Moi, je trouvais que ça avait pas de bon sens. Elle continue et monte la mise jusqu'à dix cennes… J'aurais bien pu y montrer elle ne
l'aurait pas mangée comme ont dit pis j'aurais fait dix cennes!
Mais dans ce temps
là, c'était bien défendu de jouer avec. On pouvait la gratter seulement si elle
piquait.
Parlons de notre passage à la maison de brique rouge près du
pont à St Onge. Ça brassait pas mal.
Papa avait obtenu le contrat pour la
livraison du courrier rural.Il fallait parcourir 22 miles par jour ( NDLR: un peu plus de 35 kilomètres)
Dans ce temps-là, la
livraison du courrier se faisait six jours semaine. On avait droit à trois jours par année de congé à cause de tempêtes ou autres raisons majeures. Tout ça pour quarante dollars
par mois, - chevaux et voiture compris. C'était très exigeant. Papa avait parfois
de grosses crises d'asthme mais il n'avait pas le choix, il fallait y aller.
Maman classait le
courrier par ordre pour faciliter la livraison. Elle faisait chauffer des
briques, les enrobaient dans des couverture les mettaient dans la voiture, couvrait papa avec de grosses couvertes et ça partait. Par chance, les chevaux
étaient habitués de s'approcher des boites à courrier. C'est avec leur
détermination et l'aide du petit Jésus que la livraison se faisait. Le
pire était quand , après avoir fait une bonne part de la livraison, on arrivait chez une madame qui voulait poster une lettre. Papa, les mains déjà gelées, devait enlever ses
mitaines, sortir un timbre de trois sous que l'ont collait sur l'enveloppe à
apporter au bureau de poste, puis ça repartait.
Ensuite, nous avons déménagé dans la maison de pierre à Embrun.
Après les fêtes
on grattait la neige sur la rivière Castor pour faire épaissir la glace.
Lorsqu'elle avait atteint près de trois pieds d'épaisseur, les hommes
la coupait en gros morceaux pour apporter à la glacière. Là, elle était enrobée dans le brin de scie pour la conserver tout l'été.
Nous avons vendu le lait a St-Onge et à Embrun, à 5 sous la pinte.
Les
caisses de lait étaient empilées dans une voiture fermée avec une porte de
chaque coté. Nous mettions de la glace sur le dessus des caisses elle fondait
et faisait de l'eau froide qui coulait sur les pintes de lait lors de la
livraison. Comme il n'y avait pas d'électricité, nous vendions aussi des morceaux
de glace d'environ 7 pouces carré cinq sous pour les frigidaires de cuisine.
Entretenir le troupeau, la
ferme, le fourrage, les bâtisses et tout le tracas, ça faisait bien de l'ouvrage
avant de recevoir le cinq cennes. Heureusement qu'ils avaient la foi pour
s'accrocher et se ressourcer à l'occasion.
Après avoir complété ma
scolarité à l'école St Jacques d'Embrun, j'ai été travaillé à la Cotton de
Cornwall jusqu'au printemps.
Papa était dans le nord de l'Ontario. Il travaillait à Kapuskasing et avait acheté une
ferme à Cochrane. Le climat sec du Nord lui évitait les crises d'asthme.
Il m'a
convaincu de monter avec lui pour cultiver la ferme. J'y suis resté trois ans, l'été
sur la ferme et l'hiver dans le bois. Je ne voyais pas d'avenir avec un climat
rigoureux et aurait fallu tout rebâtir. L'argent du bois l'hiver nous faisait
vivre durant l'année.
Par chance, il y avait les Grégoire pas loin ça faisait
une place où aller jaser le samedi soir. Ils nous embarquaient dans la boite de
leur petit camion le dimanche pour aller à la messe.
Mais les conditions ne me
semblaient pas prospères. j'ai dis à papa que j'aimerais essayer de faire autre
chose.
J'avais vingt ans, pas d'argent, pas d'ouvrage. J'entend parler que le gouvernement bâtissait un hôpital à Moose
Factory, près de Moosonnee, 186 milles au nord de Cochrane. La traversée de Moosonnee à Moose Factory se faisait seulement à marée haute. On cherchait des charpentiers, je me suis dis que j'étais capable de faire ça de
la charpente. Bon salaire, logé. nourri. Je travaille jusqu'au printemps. Les Indiennes commençaient à être belles, alors je me suis dit il est temps que je redescende en ville.
En ville, c'est à Cochrane. En arrivant, je vais voir l'agronome . Il me dit j'ai un emploi avec la branche animale et économique mais ça
prend de l'argent. Il fallait que j'aille prendre un cours au collège de Guelph
et que je m'achete une voiture car j'aurais à voyager entre Cochrane et Hearst.
J'accepte.
En revenant, j'arrête à
Toronto chez Emilia et Jean. Les bonnes voitures usagées étaient très rares à la
fin des années 1940. Comme on connait Jean,
il propose qu'on aille voir les
voitures et j'en achète une, même si j'ai pas de permis de conduire. Jean me fait conduire un peu et dit: demain à quatre heures, je vais te
sortir de la ville et tu montes à Cochrane.
Comme entendu, le lendemain je monte
à Cochrane et j'embarquais des gens sur le pouce. J'ai passé mon permis
de conduire le lundi matin.
. L'hiver,les chemins n'étaient pas toujours praticables. Je me suis
acheté une bonne paire de chiens et je me suis fait un bon traîneau approprié
pour mes besoins. L'automne, je m'achetais un vieux cheval
pour la viande des chiens durant l'hiver. Je mettais le traineau sur
le capot de la voiture et les chiens à l'intérieur. C'était unique, formidable
et bien spécial. J'étais jeune tout feu tout flamme et pis pas gâté. J'ai travaillé dix-sept ans pour le gouvernement provincial.
En octobre 1953 j'ai rencontré Aline à Saint- Félicien, au Lac-Saint-Jean, au Québec. La rencontre a été courtoise, agréable. Bonne nourriture, maison propre. Puisque je voyageais, ça prenait une femme heureuse dans sa maison. Nous proposons de nous revoir aux fêtes. Nous nous fiançons et propose un mariage au printemps. Nous nous voyons pour la troisième fois et le mariage a lieu le 26 avril 1954. Nous aurons 3 garçons: André, Jean et Serge.
J'ai ensuite travaillé pour le Bureau de mise en marché du lait de
l'Ontario . Le
territoire était de Parry Sound à Fort Francis à la frontière du Manitoba. J'étais le
porte parole des politiques laitière et travaillait beaucoup avec des comités
de chacune des régions. Il y avait un bon défi j'aimais ça. Les gens étaient
tous formidables. Cependant nos 3 garçons vieillissaient et nous voulions nous rapprocher des universités.
Un de mes amis me dit que la
Commission Canadienne du Lait cherche une personne pour les quotas de lait et
le transport ce que je faisait déjà dans mon travail avec la Régie du Lait. Je
pose ma candidature, passe l'entrevue, le poste m'est offert, je l'accepte.
Tout le monde est bien contents, nous nous en venons à Ottawa. L'université à
nos portes pour les gars.
Je suis devenu gérant d'environ 80 entrepôts de la Commission à travers le Canada. Il fallait entreposer les
achats de produit pour l'exportation Je suis aussi devenu Officier de transport pour planifier les
divers déplacements appropriés soit par terre, par mer ou par air pour
l'exportation du produit de la Commission. J'ai passé dix neuf ans avec la
Commission. J'ai bien aimé mon travail et apprécié beaucoup les belles
commodités de notre belle ville d'Ottawa. Ce que je retiens est que la vie est
un bon professeur il ne faut pas que nos illusions dépassent la raison.
Il y a toute une vie
personnelle dans nos cheminements. La vie c'est un théâtre; à nous de jouer le
rôle espéré. .Soixante ans déjà. Nous avons trois beaux et bons garçons. Nous en sommes
très fiers. C'est vrai qu'ils avaient une bonne mère poule pour transmettre toute
ces belles qualités. Moi aussi j'ai essayé de lui faire comprendre ma part
héréditaire et que Julia disait toujours ses trésors. Pas moyen, elle dit
encore que c'est Julia qui disait ça. Il y a encore des St. Thomas…. Moi j'ai
été l'homme le plus gâté de la terre. J'ai eu quatre cancers et un bon infarctus. Les bons soins, un bon moral et l'optimisme ont toujours été
présents. Voilà l'important du présent cueille la fleur d'aujourd'hui. Merci
Aline, merci les gars
Bref, laissons battre nos
cœurs à l'unisson car si l'amour ne se prouve guère avec raison le cœur ne
doit pas moins s'efforcer d'en écouter la
voie.
Gérard & Aline Bourdeau
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